Décès tragique d’un bébé prématuré au CHU de Lille
Cet accident particulièrement horrible a fait la une de la presse et des sites internet. Dans un service de néonatalité, une petite fille prématurée (née à 7 mois et demi de grossesse), Zayneb, est décédée. Alors qu’elle était dans sa couveuse, elle aurait été saisie par un enfant âgé de 6 ans qui déambulait dans l’hôpital. Il aurait voulu « jouer à la poupée » avec ce bébé et l’aurait fait tomber par terre.
Les circonstances du tragique accident
« Cet enfant de 6 ans, membre d’une autre famille, a effectivement été vu à proximité du berceau et de l’enfant au sol » (source : le Monde).
Victime d’un «traumatisme cranio-encéphalique très sévère, compatible avec une chute au sol », Zayneb n’a pas pu être sauvée. L’affaire est d’autant plus dramatique que la mère de Zayneb était en train de réaliser les formalités administratives au secrétariat de l’hôpital et a appris la situation en revenant auprès de son bébé.
Selon des témoignages, le petit garçon de 6 ans venait tous les jours voir sa mère, hospitalisée dans le service avec un bébé. Mais son père le déposait et repartait. Dans ce service, les fratries des bébés sont autorisées sous surveillance des parents. L’enfant se promenait alors dans le service au vu et au su de tous.
Selon « le Monde » , le grand-père du bébé décédé serait allé plusieurs fois prévenir la mère de l’enfant âgé de 6 ans pour lui indiquer qu’elle devait surveiller son fils.
Vives émotions et réactions
On est évidemment saisi d’un horrible malaise en comprenant que la mort de Zayneb est due à l’acte involontaire d’un enfant de 6 ans, livré à lui-même dans un hôpital. Dans notre système de Droit, et dans notre société, un enfant de 6 ans n’est pas considéré comme doté de « discernement » et il est donc impensable de l’accuser d’un acte si grave.
Aussi, sur la toile, les accusations fusent-elle, toutes semble-t-il dirigées contre l’hôpital : « Un enfant qui déambule sans surveillance dans le service et entre dans la chambre de bébés très fragiles, un service insuffisamment sécurisé, une surveillance trop distante… La famille de la petite fille, qui avait cinq jours lors des faits, dit avoir constaté des anomalies « concernant la sécurité de l’hôpital Jeanne de Flandre » (source : Le Monde).
La famille en deuil a protesté contre l’état de vétusté du service. Il lui aurait été répondu que des travaux auraient lieu en 2030. Choquant, peut-on lire. On parle de « défaut de surveillance ».
Le point de vue juridique
Certes les missions des établissements de santé (L6111-1 à L6111-7 du code de la Santé Publique) comprennent la sécurité du patient mais il s’agit là de protéger le patient contre les risques associés aux soins, et contre les mauvais soins. Et les hôpitaux, souvent en manque de moyens, sont loin d’être infaillibles déjà sur ce plan. Un exemple en est la condamnation récente (23 juillet 2025) du Groupe Hospitalier Public du Sud de l’Oise (GHPSO) pour homicide involontaire sur la personne d’un nourrisson, Liiam, mal pris en charge pour ses soins.
Dans le cas de Zayneb, ce ne sont pas des soins mal exécutés qui l’ont mise en danger, mais l’acte d’un visiteur. Alors que les hôpitaux (depuis les attentats) se mobilisent de plus en plus, avec les moyens du bord, contre l’intrusion de tiers malveillants, ici ce n’est pas un intrus ni un terroriste, mais un visiteur âgé de 6 ans, autorisé sous la surveillance de ses parents, qui a involontairement causé le décès d’un bébé.
L’émotion suscitée par ce drame incite à accuser l’hôpital. Mais la surveillance qui aurait dû être exercée n’est-elle pas avant tout celle de ce petit garçon de 6 ans ? Incombait-elle réellement à l’hôpital ? Quelle sera la vie de cet enfant quand il sera en âge de comprendre ce qui est arrivé ? Et surtout quelles sont réellement les chances de succès d’une action contre un l’hôpital qui semble dépourvu de moyens au point de reporter sa modernisation à… 2030 ?
Conclusion
A l’heure où vient d’être publiée la loi ATTAL 2025-568 du 23 juin 2025 qui renforce la responsabilité des parents, la question mérite d’être posée dans un cas comme celui-ci.
Car il n’est pas nécessaire de chercher si des parents sont en « défaut de surveillance ». Ils sont tout simplement responsables de plein droit des actes de leurs enfants mineurs, sauf quand ceux-ci sont « placés » en foyer ou en famille par une décision administrative. Cette responsabilité trouve sa source dans une sorte de faute présumée : l’idée que les parents doivent éduquer les enfants et veiller sur leur comportement en toute circonstance.
Et elle vient, comme par un fait exprès, d’être renforcée par la loi toute récente.
Catherine Marie KLINGLER
Avocat au Barreau de Paris