Vol de véhicule et refus d’indemnisation
Votre véhicule a été volé ? Veillez à bien rédiger votre déclaration de sinistre ! car l’assurance peut refuser de vous indemniser …
En cas de sinistre, vous devez déclarer de manière très exacte les circonstances du sinistre. La plupart du temps, votre contrat d’assurance contient une clause libellée à peu près ainsi :
« si le souscripteur ou l’assuré ou l’ayant droit de l’un ou de l’autre fait volontairement de fausses déclarations sur la nature, les causes, les circonstances ou conséquences du sinistre ou sur l’existence d’autres assurances pouvant garantir le sinistre, il est entièrement déchu de tout droit à garantie pour ce sinistre »
C’est surtout le cas de vol qui est à l’origine des contentieux les plus nombreux.
La déclaration du sinistre
La déclaration du sinistre doit être exacte.
Car si votre déclaration est volontairement inexacte, vous ne serez pas indemnisé. Votre contrat d’assurance ne sera pas annulé, mais vous ne serez pas remboursé de la valeur de votre véhicule.
Or les assurances mettent à la charge des assurés des déclarations de plus en plus complexes, en exigeant de plus en plus de documents et de précisions.
Il vous sera presque systématiquement demandé, par exemple
- Les circonstances très exactes du vol (très difficiles à formuler quand vous avez laissé votre voiture quelques jours au même endroit et ne l’avez plus retrouvée….)
- Combien vous aviez de clés de votre véhicule avant/après le vol
- Le prix d’achat de votre voiture, et comment vous l’avez payé
- Le kilométrage de votre véhicule au moment du vol.
Quelques exceptions
Pour autant ces obligations ne vous sont pas opposables dans certains cas.
Par exemple si vous n’avez pas signé les conditions générales, ou encore si vous avez signé des conditions particulières mais qu’il manque le renvoi aux conditions générales (« l’assuré reconnait avoir reçu un exemplaire des conditions générales numéro XXXYYYYZZ »).
Et attention aux « millésimes » des conditions générales !
S’il manque quelque chose, on ne peut pas vous opposer une déchéance selon la Jurisprudence de la Cour de Cassation Civile du 15 septembre 2022.
Un avocat rompu au Droit des assurances vous sera précieux pour invoquer de tels moyens, qui sont assez complexes.
Si vos obligations ont bien été correctement stipulées, et bien qu’elles paraissent exagérées au moment où votre véhicule vient de vous être volé, sachez qu’elles sont parfaitement légales.
Les erreurs à ne pas faire
Ne cherchez pas, par exemple, à surévaluer le prix d’achat de votre véhicule, ou à refuser de communiquer la facture. Cela peut se retourner contre vous.
Une décision bien sévère du tribunal judiciaire de Nanterre le 23 septembre 2011 énonce que :
« Par application de l’article 1134 du code civil, il est tenu à une obligation de loyauté dans l’exécution du contrat qu’il a conclu avec la société NEXX ASSURANCE, ce qui doit l’amener à faire une déclaration sincère et exacte de son préjudice, et par application de l’article 1315 du même code, il a la charge de prouver que la valeur de son véhicule volé (non retrouvé) correspond bien à la somme qu’il a déclarée. Il doit par conséquent précisément démontrer quelle est sa valeur d’achat, base de l’évaluation de l’indemnité d’assurance au bénéfice de laquelle il prétend, preuve en principe aisée à rapporter.”
Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de VERSAILLES le 14 novembre 2013.
N’oubliez pas non plus les doubles de clés que vous avez fait faire pour vos enfants ou pour votre beau-frère …..
Des preuves nécessaires
Pour autant, l’assurance devra prouver que vous avez volontairement fait une déclaration inexacte. Une simple erreur ne sera pas sanctionnée.
On vous pardonnera par exemple de ne plus retrouver votre facture ou votre contrat de vente si vous avez déménagé et divorcé (Cour d’Appel de Paris, 1er septembre 2015).
Si vous ne déclarez pas le kilométrage exact lors de la déclaration de vol, là encore il faudra prouver votre mauvaise foi pour vous déchoir de la garantie. Des erreurs trop importantes ne sont pas admises, elles laissent penser que vous voulez vous faire rembourser un véhicule presque neuf alors que vous savez qu’il avait un kilométrage important. Par contre on admettra qu’une différence de quelques milliers de kilomètres peut être une simple erreur, qui ne vous expose pas à une déchéance (Cour de cassation, 2ème Chambre Civile, 5 juillet 2018, n° 17-20.488) .
Conclusion
Enfin, ces dernières années, les compagnies d’assurances sont devenues de plus en plus vigilantes pour savoir comment vous avez payé votre voiture lors de son achat. Elles vous demandaient la preuve de tous les mouvements de fond (virement, chèque, espèces). Le prétexte : la lutte contre le blanchiment de capitaux.
Mais les tribunaux semblent ne plus admettre que cela puisse avoir pour effet une déchéance de garantie. La Cour d’Appel de Lyon a renvoyé la GMF dans ses buts en rappelant que la vente d’un véhicule d’occasion n’est pas soumise à l’art 561-10-2 du code monétaire et financier et que la provenance des fonds importait peu (voir aussi la Cour d’Appel de Paris le 1er mars 2022).
Ce n’est que dans des cas où la déclaration de l’assuré est particulièrement embrouillée concernant l’achat de son véhicule, son kilométrage, son financement, que l’on va douter de sa bonne foi.
Il reste qu’il faut rédiger sa déclaration de sinistre en essayant de ne rien oublier et de ne surtout pas la faire varier dans les jours qui suivent. Mieux vaut déclarer avec 24H de retard que de revenir sur une déclaration mal faite.
Les procédures se multiplient particulièrement pour les cas de vols de véhicule et il est important de bien connaître le Droit des assurances, pour se faire indemniser et surtout pour évaluer d’emblée et rapidement quelles sont les chances de succès de votre demande.
Catherine Marie KLINGLER
Avocat au Barreau de Paris